La Cité des marches - Robert Jackson Bennett

Bulikov, la capitale du Continent. Autrefois une ville grande et puissante, le centre du monde. Aujourd’hui une ville conquise, en partie détruite. Rome après Alaric. Kind of. Dans le monde de La Cité des marches , dernier roman traduit en français de Robert Jackson Bennett et premier volume de le trilogie des Cités divines , il y a le Continent et le reste – ce centre-périphérie théorisé au XIV siècle par le grand historien arabe Ibn Khaldoun . Et, comme dans l’analyse de ce dernier, la périphérie a fini par conquérir le centre, en l’occurrence le Continent ; rien d’étonnant, ce n’est qu’à la périphérie que résident la force et la détermination nécessaires à la guerre. Concrètement, c’est une révolte conduite avec succès il y a plusieurs décennies par le Kaj qui a abattu l’empire continental et ses dieux. La chute des uns entrainant celle de l'autre. Car tu dois le savoir, lecteur, le pouvoir sans égal du Continent était le fruit des « miracles » de ses six dieux, incarnés dans le

No one ever knows or loves another


Les lecteurs assidus de ce blog savent que je ne suis pas très friand des romans de Stephen King. Je trouve que le monsieur tire trop à la ligne ce qui tend à délayer rapidement mon intérêt. Ce problème disparaît évidemment quand il écrit des nouvelles, ce qui explique que je me sois empressé de charger "Full dark, no stars" dans mon Kindle.
"Full Dark, no stars" est donc le dernier recueil de King et il est très stimulant. Trois nouvelles assez longues, une plus courte, mais toutes sont de qualité.
Dans ce recueil, King écrit de nouveau des histoires horrifiques, mais, comme dans Misery par exemple, les horreurs qu’il décrit proviennent des tréfonds de l’âme humaine, y compris quand intervient un élément fantastique ce qui est le cas pour deux des quatre textes.
1922 est un très bon récit à la première personne dans lequel le lecteur assiste, comme ultime confident, aux tourments qui assaillent un fermier meurtrier de sa femme. Les personnages sont finement décrits, leurs motivations sont crédibles, la langue et les références sont bien celles des ruraux américains. La qualité principale de ce texte, par delà son écriture, est la description des rapports qui se nouent entre le meurtrier et son complice, ainsi que leur évolution progressive. Il est question de fantômes ici, mais existent-ils vraiment ? Le remord, la peur, le doute sont les vrais fantômes qui font de la vie de ce fermier un enfer. Quand le mieux est l’ennemi du bien, on peut amèrement regretter d’avoir voulu le mieux.
Big Driver est une histoire de vengeance, très proche des films de Rape and Revenge auquel il fait parfois explicitement allusion. Très référencée, la nouvelle est assez classique dans son traitement tout en restant extrêmement efficace. Le personnage principal est original car n'ayant pas, à priori, les compétences pour une vengeance (c'est Arabesque en plus jeune), il va s’en découvrir dans le cadre de son activité d’écrivain de romans policiers. Comme dans 1922, le plus intéressant est la description minutieuse de l’état d’esprit de la victime et de son évolution. Instinct de survie, effroi, désir de savourer la vengeance, mais aussi, incrédulité, doute, remords se bousculent dans la tête d'une héroïne transformée à jamais par le cauchemar qu'elle a vécu. King maitrise assez son sujet pour se permettre de jouer avec les codes du slasher et du rape and revenge en les citant plusieurs fois pour s'en amuser et brouiller les pistes.
Fair extension revisite le thème du pacte avec le diable. King le modernise en proposant un diable qui n'a que faire des âmes et repose le dilemme de la Boite en y ajoutant un élément innovant : le bien (une guérison) que reçoit l'un est pris en mal à son plus vieil ami. La nouvelle, assez courte, accumule ensuite la sauvegarde et la réussite du signataire du pacte et la déchéance progressive de son meilleur ami et de toute sa famille. Pas une fois l'envieux ne regrette ; il semble considérer que ce n'est que justice si après avoir eu tant de bonheur son ami connait sa part de malheur, et on pense ici aux conducteurs qui ralentissent près d'un accident ou aux lambdas qui se réjouissent secrètement de la chute d'une célébrité.
A good marriage est peut-être la meilleure. Une femme découvre que son gentil mari depuis vingt-sept ans a un effroyable secret. Le dénoncer parait la seule chose à faire mais est-ce possible alors qu'est en jeu la façade sociale de son mari et de sa famille ? Est-ce possible alors qu'il lui jure qu'il l'aime, qu'il ne lui fera jamais de mal, qu'il ne fera rien pour l'empêcher de tout dire à la police ? Est-ce possible alors que, comme un junkie en phase de remords, il lui promet que jamais, plus jamais, il ne cèdera à ses pulsions ? Que décider ? Comment vivre avec sa décision ? Que faire ensuite ? Et plus généralement, que savons-nous des êtres dont nous partageons la vie ? Quelle part d'eux-mêmes nous est accessible ? Pourquoi est-il si facile de mentir et d'être cru ? Après Baudelaire et ses Yeux des pauvres, et The Cure et leur adaptation du même, King remet ces questions sur le métier.
Dans un style de grande qualité, qui réussit à être simultanément riche et parlé, KIng impressionne avec ces quatre nouvelles que tout amateur de fantastique devrait lire.
Full dark, no stars, Stephen King

And for spleen and ideal

Commentaires

Chris a dit…
Bonsoir,

Les anciens romans de Stephen King écris sous la plume de Richard Bachman sont aussi intéressants que ses nouvelles (style plus bref et percutant), dont Rage et running man.

Son rapport avec son alter égo lui inspirera également "la part des ténèbres", un roman qui doit sans doute beaucoup aux oiseaux d'hitchcock.
Gromovar a dit…
Faudra que je m'y essaie alors. Parce que, pour ce qui est de ses romans sous son nom...
faudra que je teste cela :)
Gromovar a dit…
Comparatif mutuelle, donc...
J'ignorais que c'était de la SFFF.